Aliro : Le nouveau standard qui unifie les serrures connectées

Le marché des serrures connectées souffre depuis des années d’un problème majeur : chaque fabricant développe sa propre technologie. Résultat, les consommateurs doivent jongler entre plusieurs applications selon les marques de leurs équipements. Cette fragmentation freine l’adoption massive de ces dispositifs.

Pour répondre à cette problématique, la Connectivity Standards Alliance a développé Aliro, un protocole ouvert soutenu par Apple, Google et Samsung. Une collaboration exceptionnelle entre ces trois concurrents pour créer un standard universel, à l’image de ce qui avait été réalisé avec Matter pour la domotique.

Trois technologies complémentaires

Aliro s’appuie sur trois technologies de communication :

• L’Ultra-Wideband (UWB) permet une localisation précise au centimètre près. Le smartphone détecte votre approche à 3 mètres, s’authentifie à 1 mètre et déclenche l’ouverture au contact de la porte.
• Le NFC sert de solution universelle pour les appareils sans puce UWB. Il suffit d’approcher le téléphone de la serrure pour l’ouvrir, comme pour un paiement sans contact.
• Le Bluetooth Low Energy complète le système en permettant la communication à distance moyenne et la préparation de l’authentification.

Cette approche multicouche garantit la compatibilité avec tous types de smartphones tout en offrant la meilleure expérience selon les capacités de chaque appareil.

Sécurité renforcée par rapport aux clés traditionnelles

Aliro utilise un chiffrement asymétrique similaire aux transactions bancaires. Chaque clé numérique est unique et ne peut être dupliquée. L’avantage majeur : en cas de vol du smartphone, l’accès peut être révoqué instantanément à distance, contrairement à une clé physique perdue.

Le système intègre des mécanismes anti-piratage qui empêchent la réutilisation de signaux interceptés et détectent les tentatives d’intrusion suspectes.

Dans le monde professionnel, cela permettra par exemple à un hôtel de générer une clé éphémère à ses clients, limitée au temps du séjour, ou aux visiteurs d'une entreprise d'avoir accès à un seul bureau le temps d'une réunion. Enfin, pour une municipalité, cela facilitera l'accès aux installations sportives, par exemple pour la réservation d'un court de tennis. Le tout, totalement automatisé et dématérialisé.

L'adoption est déjà en cours

Samsung a annoncé intégrer Aliro dans Galaxy Wallet dès cette année pour les appareils équipés d’UWB, tels que les Galaxy S Plus et Ultra depuis le S21 ou encore les Galaxy Z Fold Spécial Edition et Fold 2. Google fait de même avec Google Wallet sur Android et Wear OS. Apple transpose progressivement sa technologie HomeKey vers ce standard ouvert.

Les fabricants de serrures (Yale, Schlage, Assa Abloy) proposent déjà des modèles compatibles. Le prix moyen s’établit autour de 300 euros, soit 50 euros de plus qu’une serrure connectée standard.

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Imaginez un monde où vous n’auriez plus jamais à chercher vos clés au fond de votre sac, où votre smartphone deviendrait votre passe-partout universel. Ce futur n’est plus un rêve impensable et il porte un nom : Aliro.

Derrière ce nom aux consonances exotiques se cache une révolution technologique majeure, fruit d’une collaboration entre les géants Apple, Google et Samsung et un objectif clair : remplacer la clé physique traditionnelle. Une collaboration exceptionnelle entre ces trois concurrents pour créer un standard universel, à l’image de ce qui avait été réalisé avec Matter pour la domotique.

Mais ils ne sont pas seuls. Assa Abloy, la maison mère de Yale, ainsi que Qualcomm et NXP sont également de la partie.

Quand les géants de la tech enterrent la hache de guerre

“C’est un moment historique”, confie un ingénieur de la Connectivity Standards Alliance, l’organisme qui chapeaute le projet Aliro. “Voir Apple, Google et Samsung s’accorder sur un standard commun, c’est aussi rare qu’une éclipse solaire totale.”

Ce n'est pas sans rappeler Matter, qui avait vu en décembre 2019 ces trois géants travailler ensemble dans un groupe qui comptait également Amazon, Comcast ou Huawei pour ne citer qu'eux.

Cette alliance contre-nature s’explique par un constat partagé : le marché des serrures connectées, malgré son potentiel énorme, reste fragmenté et complexe pour les consommateurs.

Chaque fabricant développait jusqu’ici sa propre solution propriétaire, créant un véritable casse-tête pour les utilisateurs. Résultat : une adoption timide et des écosystèmes incompatibles entre eux. “Nous avons reproduit les erreurs du début d’Internet”, analyse un expert en domotique. “Aliro, c’est notre protocole HTTP pour les serrures.”

Le nom lui-même n’a pas été choisi au hasard. Dérivé de l’espéranto et signifiant “accès”, Aliro symbolise cette volonté d’universalité. Un clin d’œil à peine voilé à l’ambition du projet : créer un langage commun que tous les appareils pourront comprendre, quelle que soit leur marque.

La technologie expliquée simplement : trois lettres magiques

Pour comprendre Aliro, il faut d’abord saisir les technologies qui le sous-tendent. Trois acronymes reviennent sans cesse : NFC, BLE et UWB. Derrière ces sigles barbares se cachent des innovations que vous utilisez déjà. Le NFC (Near Field Communication), c’est cette technologie qui vous permet de payer sans contact avec votre carte bancaire. Avec Aliro, il suffit d’approcher votre smartphone de la serrure pour qu’elle s’ouvre, comme par magie. Simple, efficace, mais nécessitant un geste volontaire.

Le BLE (Bluetooth Low Energy) va plus loin : il permet à votre téléphone de “discuter” avec la serrure à distance, préparant l’ouverture avant même que vous n’arriviez devant la porte. Fini les attentes sous la pluie, les mains chargées de courses.

Mais c’est l’UWB (Ultra-Wideband) qui représente la véritable révolution. Cette technologie, popularisée par Apple avec ses AirTags, permet une localisation d’une précision chirurgicale. “L’UWB peut déterminer votre position à 10 centimètres près”, explique un ingénieur de Samsung. “C’est ce qui permet le déverrouillage mains libres : la serrure sait exactement où vous êtes et s’ouvre automatiquement quand vous vous approchez.”

Samsung ouvre le bal avec un déploiement ambitieux

Si Apple a inspiré Aliro avec sa technologie HomeKey, c’est Samsung qui dégaine en premier avec une annonce fracassante en octobre 2024. La firme coréenne intègre Aliro directement dans sa Galaxy Wallet, transformant ses smartphones haut de gamme en clés universelles.

Le système fonctionne par étapes, comme une danse technologique parfaitement chorégraphiée. À trois mètres de la porte, votre Galaxy S24 détecte la serrure via UWB. À un mètre, l’authentification cryptographique s’enclenche. Au contact, si l’UWB fait défaut, le NFC prend le relais. “C’est de la redondance intelligente”, souligne un expert en sécurité. “Trois systèmes pour un seul objectif : que ça marche, tout le temps.”

Les premiers tests sont concluants. Les temps de réponse, inférieurs à 500 millisecondes, rivalisent avec l’insertion d’une clé physique. Mieux encore : le système apprend de vos habitudes. Il sait distinguer si vous passez devant la porte ou si vous voulez réellement entrer, évitant les ouvertures intempestives.

Google mise sur la démocratisation

Pendant que Samsung vise le haut de gamme avec l’UWB, Google adopte une stratégie différente. L’intégration d’Aliro dans Google Wallet, officialisée en mars 2025, privilégie l’accessibilité. “Notre objectif, c’est que chaque possesseur d’Android puisse bénéficier d’Aliro”, explique un porte-parole de la firme de Mountain View.

Cette approche se traduit par un focus sur le BLE et le NFC, technologies présentes sur la quasi-totalité des smartphones Android. Moins spectaculaire que l’UWB, certes, mais infiniment plus démocratique. Google collabore avec des fabricants de puces comme STMicroelectronics pour proposer des solutions à moins de 50 euros, rendant Aliro accessible au plus grand nombre.

La stratégie porte ses fruits. Les premières serrures compatibles Google Wallet-Aliro arrivent sur le marché français au printemps 2025, avec des prix démarrant à 199 euros. “C’est un point de bascule”, analyse un spécialiste du marché. “À ce prix-là, Aliro devient compétitif face aux serrures traditionnelles haut de gamme.”

Apple : de l’innovation propriétaire au standard ouvert

L’évolution d’Apple sur ce dossier illustre un changement de paradigme majeur. Avec HomeKey, lancé en 2021, la firme à la pomme avait créé une solution élégante mais fermée, limitée à l’écosystème iOS. Trois ans plus tard, Apple fait volte-face et ouvre sa technologie via Aliro.

“C’est un aveu d’échec relatif”, confie un ancien ingénieur d’Apple. “HomeKey fonctionnait parfaitement, mais son adoption restait confidentielle. Apple a compris qu’un standard ouvert servirait mieux ses intérêts à long terme.” Cette ouverture stratégique permet à Apple de rester leader technologique tout en bénéficiant d’un écosystème élargi.

Les utilisateurs d’iPhone pourront ainsi profiter d’un choix de serrures bien plus vaste, tandis que les fabricants de serrures accèdent au marché iOS sans développement spécifique. Un win-win qui illustre la maturité croissante du secteur.

Des applications qui dépassent le cadre domestique

Si Aliro révolutionne l’accès résidentiel, ses applications s’étendent bien au-delà du foyer familial. Dans l’hôtellerie, la technologie permet de générer des clés éphémères, valables uniquement pendant la durée du séjour. Plus besoin de faire le détour par la réception en cas de perte : une nouvelle clé numérique peut être envoyée instantanément sur le smartphone du client.

Les entreprises y trouvent également leur compte. Kastle Systems, spécialiste américain de la sécurité, expérimente des déploiements à grande échelle dans des parcs immobiliers commerciaux. “Nous observons 40% d’économies sur les coûts de maintenance comparé aux systèmes traditionnels”, rapporte un responsable de l’entreprise. La révocation instantanée des droits d’accès et l’audit traçable des entrées-sorties séduisent les gestionnaires immobiliers.

Même la location saisonnière s’empare du phénomène. Airbnb teste discrètement l’intégration d’Aliro dans son application, permettant aux propriétaires de gérer l’accès à distance sans échange physique de clés. Une révolution pour un secteur habitué aux boîtiers à codes peu sécurisés.

Les défis de la sécurité à l’ère numérique

Mais cette révolution soulève des questions légitimes. Confier l’accès à son domicile à un smartphone peut inquiéter. “La sécurité d’Aliro repose sur plusieurs couches de protection”, rassure un expert en cybersécurité. “Chiffrement asymétrique, authentification biométrique, révocation à distance… C’est paradoxalement plus sûr qu’une clé physique.”

Le protocole intègre des garde-fous sophistiqués. En cas de vol du smartphone, l’accès peut être révoqué instantanément à distance. Impossible avec une clé traditionnelle, qui nécessite le changement complet de la serrure. De plus, chaque interaction est tracée et horodatée, permettant un audit précis des accès.

Reste la question de la vie privée. Centraliser les données d’accès chez les GAFA inquiète certains observateurs. La Connectivity Standards Alliance répond par une certification tierce obligatoire, incluant des audits cryptographiques biannuels. “Nous appliquons les standards les plus stricts de l’industrie”, assure un responsable de l’organisme.

Un marché en pleine ébullition

Tout n'est pas gagné pour autant

Reste une ombre au tableau que l'on vient de dépeindre : le temps d'adoption. Si la solution technologique permettant de remplacer les clés physiques semble prometteuse, l'acceptation sociologique pourrait être longue : nombreux sont les utilisateurs attachés à la matérialité de la clé physique, et la question de la dépendance technologique reste une inquiétude pour beaucoup.

Les perspectives sont toutefois prometteuse : le marché des serrures connectées devrait passer de 2,3 milliards de dollars en 2024 à 8,1 milliards en 2030. L’arrivée d’Aliro pourrait accélérer cette croissance en levant les obstacles à l’adoption. Les analystes prévoient 500 millions d’appareils compatibles Aliro d’ici 2027, portés par l’essor de la domotique et l’amélioration de l’expérience utilisateur.

Yale, Schlage, Assa Abloy… tous les grands noms de la serrurerie s’engouffrent dans la brèche.

“Nous assistons à la convergence de trois tendances : la maturité des smartphones, l’essor de la domotique et la standardisation des protocoles”, analyse un cabinet d’études spécialisé. “Aliro arrive au bon moment, avec les bons partenaires.”

Le prix reste un frein relatif. Comptez 299 euros en moyenne pour une serrure Aliro en 2025, contre 249 euros pour une serrure connectée standard. Mais l’écart se resserre rapidement, et les fonctionnalités supplémentaires justifient largement le surcoût.

Nuki mise également sur Aliro, un futur standard universel pour les clés numériques. "Dès que le standard sera disponible, nous lancerons un accessoire Aliro compatible NFC, fonctionnant avec toutes les Smart Locks Matter de Nuki", annonce Jürgen Pansy.

Vers un monde sans clés

Alors, sommes-nous à l’aube d’un monde sans clés ? “Dans dix ans, chercher ses clés sera aussi anachronique que consulter un annuaire papier”, prédit un futurologue spécialisé dans les technologies émergentes. Une vision peut-être optimiste, mais qui reflète l’ampleur de la transformation en cours.

Aliro n’est que le début. La Connectivity Standards Alliance travaille déjà sur des extensions du protocole : accès aux véhicules, casiers intelligents, distributeurs automatiques… L’objectif ultime ? Faire de votre smartphone l’unique sésame de votre vie quotidienne.

Cette révolution silencieuse transformera nos habitudes plus sûrement que bien des innovations tapageuses. Car au final, Aliro ne fait qu’une chose : simplifier un geste que nous répétons des dizaines de fois par jour. Et c’est peut-être cela, la plus belle des révolutions technologiques : celle qui se fait oublier pour mieux nous servir.

L’avenir frappe à notre porte. Et cette fois, nous n’aurons même pas besoin de chercher nos clés pour lui ouvrir.